La violence et les femmes à Marseille au XVIIIe siècle

Christophe Regina, Dire et mettre en scène la violence à Marseille au XVIIIe siècle, Paris, Classiques Garnier, 2017, 423 p, [54 €].

Ceux qui sont allergiques à toute interrogation autour du « genre » éviteront la lecture de ce livre. Christophe Regina en est l’un des historiens spécialistes pour le sud-est de la France durant l’époque moderne, c’est-à-dire avant la Révolution française.

Les travaux de l’auteur (comme Genre, mœurs et justice, les Marseillaises et la violence au XVIIIe siècle, Presses universitaires de Provence, 2015, 282 p) se placent notamment dans la lignée de ceux d’Arlette Farge (qui est citée douze fois en bibliographie ; elle était en 2012 la présidente du jury de thèse de Christophe Regina) et de l’historienne américano-canadienne Natalie Zemon-Davis.

L’étude de Christophe Regina pose d’emblée « la dimension sociale de l’archive » permettant « d’envisager l’esquisse exécutée par le greffier des femmes confrontées à la violence et qui font l’expérience de l’autre » (p 34). Les différences entre communauté et société sont définies page 37.

Si les témoins des affaires traitées sont des « natifs de Marseille » (52 %), 1 % sont originaires d’Embrun et 1,6 % de Gap. Mais ces natifs des Alpes proviennent-ils des villes évêchés ou bien des terroirs alentours ? 90 % des déposants sont des Provençaux, ce qui donne des éléments de réponse à l’interrogation sur le cosmopolitisme marseillais au XVIIIe siècle (p 101-102).

La troisième partie de l’ouvrage (p 285-351) est consacrée à « la diversité des violences quotidiennes », notamment celle « exercée sur les hommes » par les femmes (p 287-304). Le lien entre les femmes et les violences familiales est traité pages 305-317, et entre les femmes et la violence collective (p 319-329). Dans ces dernières pages sont présentés les thèmes du « rapt de séduction » et de l’abandon de la femme lorsqu’elle est enceinte ou qu’elle vient d’accoucher. C’est alors que s’établissent des formes de solidarité féminine (p 325-329).

Les « sources et bibliographie » sont particulièrement fournies. Notons dans les sources imprimées Le Grand dictionnaire historique de Louis Moreri (p 374) dont un exemplaire est conservé à la médiathèque Mgr Depéry. Soulignons ici la citation de la contribution du père Jean-Louis Gazzaniga, aujourd’hui vicaire général du diocèse de Nice, « la formation des avocats aux XVIIe et XVIIIe siècles » parue dans un ouvrage collectif dirigé par Yves Durand et Jean-Pierre Bardet en 2000. Les index des noms (p 407-413) et thématiques (p 415-418) auraient pu être complétés par un instrument de recherche des lieux cités.

Luc-André Biarnais
archiviste du diocèse de Gap et d'Embrun

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