Pierre-Yves Ghestem, Rencontres sur un chemin de croix : la destinée de Judas, Paris : Saint-Honoré, 2018, 75 p., 10 €.
Cette pièce de théâtre a pour sous-titre : La destinée de Judas. Elle vise, en effet, à revisiter le drame de l’apôtre Judas. Quels étaient ses buts ? À Gethsémani, Jésus a souhaité voir s’éloigner « la coupe », mais laquelle ? pourquoi les apôtres s’endorment-ils ? pourquoi Jésus les réveille-t-il ? Que recouvrent les larmes de Pierre ? Que signifient les ténèbres au Golgotha ? Au final, le destin de Judas peut-il maintenant se transfigurer en destinée, ouverte à la lumière ? Une Lumière offerte à tous ?
Pierre-Yves Ghestem est médecin ORL, impliqué dans le mouvement Aide à l’Église en détresse (AED), et très attentif aux études bibliques sur l’élaboration des évangiles de la Passion de Jésus et sa crucifixion, en réfléchissant à partir de documents araméens, hébreux et grecs. Sa bibliographie, avec vingt-deux titres, manifeste ses pistes de recherche pour éclairer les récits de la Passion, les divers messianismes, dont les études de Mgr Francis Alichoran, Jean Carmignac, René Laurentin, Claude Tresmontant. L’auteur fait aussi appel à Flavius Josèphe, Tertullien et Eusèbe de Césarée.
La pièce de théâtre se déroule en quatre actes : à Gethsémani, la trahison par Judas ; la condamnation de Jésus par le Sanhédrin et par Pilate ; la Passion de Jésus et son chemin de Croix, au Golgotha, le crucifiement de Jésus, ses dernières paroles, et sa mise au tombeau. Au total, un déploiement en quinze scènes comme les stations d’un chemin de Croix. Les personnages sont donc nombreux : le narrateur (textes des évangiles), Judas, Matthieu, les trois rois mages, les trois disciples de Gethsémani (Pierre, Jacques, Jean), Pilate, Hanan et Caïphe, Hérode, Véronique et les femmes, le centurion et les légionnaires, les larrons, Nicodème et Joseph d’Arimathie. Tout ce déroulement de la Passion de Jésus est livré à la réflexion de Judas, en ses souffrances, pour prise de conscience décisive de la légitimité de Jésus comme véritable Messie et Sauveur. Au début, Judas proteste : « C’est violent ! Pourquoi dois-je revivre sans fin cette terrible journée depuis 2000 ans ? » (p. 9). Judas est incité à mieux comprendre les choix prophétiques de Jésus, et à accueillir l’évangile d’amour et le pardon du Maître. À la fin, Judas est débordé par la surprise, par la réalisation de « l’impossible, à nouveau », ébloui par une révélation, au Golgotha, par la lumière de la Croix du Christ.
Par la modalité de l’expression théâtrale, Pierre-Yves Ghestem trouve ici le moyen d’amener le tout-public à se réapproprier le contexte messianique des récits de la Passion de Jésus. Il conduit les spectateurs à reconsidérer le drame de la foi des apôtres et la destinée de Judas avec la possibilité d’une « renaissance » (p. 69) dans la miséricorde du Seigneur. L’enjeu théologique est intense : en Jésus, le salut envers chacun est advenu pour ouvrir l’avenir. Le mage Gaspard en a l’intuition : « l‘inouï va se produire ; un jour nouveau se lèvera pour toute l’humanité ! » (p. 69).
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