Les Amis des Monastères, n° 195, juillet 2018, 80 p., 7 €.
Ce numéro de la revue des Amis des Monastères, consacré aux bibliothèques de communautés religieuses, s’ouvre sur un préambule de la rédaction. Il évoque pour justifier le sujet le « critère d’ouverture au public – ou à un certain public – qui a joué le rôle de boussole ». La restriction « à un certain public » aurait mérité une explication de la part de l’auteur.
Florence Capy, présidente de l’association des bibliothèques chrétiennes de France précise (p 3) : « une bibliothèque est donc d’abord une collection organisée de documents avant d’être un bâtiment, un lieu de sociabilité et un ensemble de ressources et de services ». Cependant, faut-il souscrire sans nuance à cette affirmation (p 3) : « là où les nouvelles technologies nous offrent une multitude de moyens de communications que l’on peut utiliser en tous lieux, et à n’importe quel moment, où l’on zappe, où l’on ne prend plus le temps, la lecture reste nécessaire car le livre se lit lentement ». Un document, n’est-ce pas aussi un simple outil de travail en papier ou bien électronique, pour trouver un renseignement rapidement ou étayer un travail théologique ? De plus, les technologies utilisées depuis plus de vingt ans, et désormais par tous, sont très utiles en bibliothèque (catalogage, mise en ligne de recension, mise à disposition d’ouvrages numérisés, exposition virtuelle…). La bibliothèque est un « lieu vivant, en mutation […] ».
Deux bibliothèques ayant fait l’objet d’un déplacement des documents vers une institution publique sont présentées. L’une est la bibliothèque provinciale des franciscains de Corse qui a déposé 12 000 volumes à la bibliothèque municipale de Bastia : ils « sont le reflet de l’histoire religieuse et culturelle de la Corse » (p 14-18). L’autre est « la collection jésuite des Fontaines : de Chantilly à la Part-Dieu » (p 22-31). L’article pose deux questions que doivent se poser les bibliothécaires. L’une d’elle est de placer un document, une collection dans un contexte qui n’est pas figé : quelles sont les acquisitions qui permettent de les faire vivre (p 28) ? L’autre (p 29) est le travail de réflexion sur les raisons d’une valorisation en ligne : quels publics sont atteignables ? Quels moyens sont mis en œuvre pour aboutir au résultat voulu ? Une fiche du groupe de travail sur l’archivage électronique de l’Association des archivistes de l’Église de France sur ce thème sera disponible dans les prochains mois.
Isabelle Berthou Bray, bibliothécaire de la Bibliothèque bretonne de l’abbaye de Saint-Guénolé, à Landévennec, nous montre un conservatoire de la civilisation bretonne tant en bibliothèque qu’en archives. Par exemple, des microfilm de manuscrits bretons (p 8) y sont présents. En revanche, le catalogue ne semble pas en ligne : mais pourquoi cette bibliothèque ne rejoint-elle pas le projet budoc.fr ?
Une autre bibliothèque vivante et active est présentée : celle du monastère bénédictin du Mesnil Saint-Loup (p 32-35). Elle est héritière de la bibliothèque du grand séminaire du diocèse de Troyes. L’article montre l’utilité de l’ « opac », le portail grand public d’un catalogue de bibliothèque en ligne : l’outil compte les références de 60 000 ouvrages. Enfin, Le Saulchoir, bibliothèque parisienne des dominicains est la seule dans ce numéro à mettre en avant la numérisation y compris à la demande (p 40-42). Cela pourrait être un premier pas vers une offre de livres numérique possible dès la mise en place d’un catalogue en ligne, comme c’est le cas ici.
Et le RGPD dans tout cela ?
Ce numéro des Amis des Monastères publie (p 56-57) une fiche sur le règlement général sur la protection des données (RGPD) à laquelle il est possible d’apporter deux nuances.
Le registre des traitements ne doit pas être obligatoirement sur « papier » : des matrices informatiques existent auprès de services juridiques d’Église. En outre, des données à caractère personnel peuvent être conservées sur de très longues durées et même doivent l’être quand elles touchent à la protection des mineurs par exemple (trente ans après la majorité des personnes). Ensuite, après l’expiration de la durée d’utilité administrative (DUA), elles peuvent être versées aux archives historiques dont relèvent aussi les archives numériques. L’archiviste sur ce dossier doit être l’un des interlocuteurs et saura s’il faut les garder ou les éliminer.
D’une manière transversale pour ce numéro, il est nécessaire que chaque bibliothécaire réfléchisse aux données conservées dans son outil de catalogage : souvent, le prestataire extérieur a traité la question et en a informé le service. Dans le cas contraire, il convient de le solliciter.
Le règlement général sur la protection des données est là pour protéger et souvent inciter à conserver de manière sûre les informations plutôt que de les détruire !
Luc-André Biarnais archiviste du diocèse de Gap et d'Embrun