Michel Fauquier, Une histoire de l’Europe, Monaco : Éditions du Rocher, 2018, 749 p., 29 €.
Le sous-titre Aux sources de notre monde montre l’ampleur de la réflexion que développe avec une remarquable érudition et une réelle détermination Michel Fauquier. L’auteur est professeur en khâgne au Sacré-Cœur de la Perverie à Nantes, directeur de recherche à l’Institut Albert-le-Grand, et chercheur en études supérieures de civilisation médiévale. L’illustration de la couverture du livre évoque les tiraillements entre les pays d’Europe, et l’auteur ne manque pas de souligner que nous sommes actuellement dans une « crise sans précédent » (p. 9) qu’il s’agit de surmonter au bénéfice de la construction européenne en faisant prévaloir « une pente surnaturelle » (p. 713).
Sur la base d’une riche documentation universitaire et d’inspiration chrétienne (Henri-Irénée Marrou notamment), cet ouvrage constitue une véritable somme qui se déploie en quatre grandes parties. D’abord, les fondements décisifs de l’Europe : Athènes, Rome, et même, ou surtout, Jérusalem. Les Grecs font face à l’Orient, tandis que l’Occident se constitue sur la base de l’Empire de Rome et sur l’Église grandissante qui offre une nouvelle espérance, par sa dynamisante inculturation sur l’aire géographique européenne. Viennent ensuite les temps médiévaux sur la base d’un Occident chrétien. Apparaît un nouveau type d’empire. La monarchie s’établit, et la France en donne un exemple. La « construction monastique » se constitue aussi, avec les « phares » que sont Cluny et Cîteaux, puis les ordres mendiants. La troisième partie aborde l’époque moderne en sa « difficile gestation » (p. 281) du fait du « désenchantement du monde ». Un équilibre européen se cherche : « des Ténèbres ont jailli les Lumières ? » (p. 461). La dernière partie présente l’époque contemporaine (p. 499). La Révolution française apporte à l’Europe une militance de liberté, mais, au XXe siècle, une ère de totalitarismes sévit sur les populations, et des « épisodes épouvantables ayant leur épicentre en Europe » (p. 711) touchent toute l’humanité. Dans la suite de la constitution de l’Union européenne, l’actualité, dont le Brexit, nous place « à la croisée des chemins ». Dans l’épilogue, Michel Fauquier lance un appel à se responsabiliser pour la construction du vivre-ensemble européen. Il conclut sur l’intérêt de l’enseignement social de l’Église en citant longuement une lettre de Jean-Paul II : « Pas de paix sans justice, pas de justice sans pardon » (p. 713).
Sur la visée de l’auteur, il sera fructueux de se référer à l’exhortation apostolique postsynodale de Jean-Paul II, L’Église en Europe (2003, 139 p.)
Par son contact avec les étudiants en classes supérieures, Michel Fauquier procède de façon très pédagogique, avec un style dynamique, avec des illustrations, synthèses, tableaux (chronologies…), documents en encarts, bibliographies argumentées, et un précieux index de noms de personnes, de lieux, et de thèmes. C’est dire combien est opportun cet outil de travail aussi approfondi et précis que militant pour une Europe évolutive à construire selon la triple force des « sources de notre monde » pour le service de la justice, de la fraternité, et de la paix dans l’ensemble de l’humanité.
Père Pierre Fournier diocèse de Gap et d'Embrun 1948 - 2021