Ghaleb Bencheikh explique le Coran

Ghaleb Bencheikh, Le coran expliqué, Paris : Eyrolles,2018, 222 p., 12 €.

Docteur ès sciences, de formation philosophique et théologique, Ghaleb Bencheikh est, selon son ami franciscain, le frère Gwénolé Jeusset : « un homme qui a toujours combattu pour un islam sereinement inculturé, et pour une fraternité entre croyants, intervenant aux émissions télévisées du dimanche matin et à France Culture, remarqué pour sa culture, pour son goût et le maniement de la langue française ». Ces qualités de pensée et d’expression se vérifient dans ce livre qui en est à sa seconde édition (première édition, 2015).

L’auteur entend ici faire face à beaucoup de préjugés sur l’islam et son prophète. Il présente donc une synthèse d’introduction et de référence pour éclairer le contexte, les valeurs et l’actualité du texte (sous-titre). Avec beaucoup de pédagogie, Ghaleb Bencheikh procède en six étapes. D’abord le contexte historique et religieux du Coran : l’Arabie au VIIe siècle et le « destin hors du commun » de Muhammad (vers 570-632). Puis le livre du Coran lui-même, « copie d’un céleste archétype », organisé en 114 sourates. Ensuite, le coeur de l’islam : comme foi au Dieu d’amour miséricordieux aux 99 plus beaux Noms, comme culte selon les cinq piliers (profession de foi, prière, aumône, jeûne, pèlerinage), comme éthique : le bel-agir (îshan) et la mystique pour l’élévation de l’âme. Enfin, l’homme dans le monde : dans la Création et la cité, dans la société (place de la femme, mariage, sexualité, famille), la morale, et la question de la violence (la double interprétation du djihad : le combat extérieur et surtout le combat intérieur, la conversion). L’auteur résume ainsi : « Dieu aime les hommes qui font le bien, dans un esprit de vraie piété, d’humilité, et d’équité » (p. 171).

Le lecteur apprécie particulièrement qu’au fil du texte les citations soient amplement reproduites pour s’imprégner de l’originalité littéraire et spirituelle du texte. L’intérêt interreligieux est manifeste, du fait que Ghaleb Bencheikh fait référence aux auteurs de la Bible (Genèse, prophètes). Il pose la question des relations entre le Coran et la Bible juive et chrétienne (p. 14, 68). Un index indique les noms (d’Abraham et Adam à Zacharie), les notions (anges, apocalypse, djihâd, évangiles, Révélation), et des sourates selon leur titre (Fatiah, Joseph, Noé). Un autre très utile index donne la liste des sourates citées (plus des deux tiers sur les 114 avec leurs titres). Classée autour de trois éléments (le Coran, les prophètes – Muhammad et l’islam), la bibliographie renvoie à la fois à des auteurs musulmans (Mahmoud Hussein…) et chrétiens (Louis Gardet). Ghaleb Bencheikh emprunte à l’islamologue chrétien Louis Massignon l’éclairante formule : « L’islam est l’acceptation du Coran, avant l’imitation du Prophète », sachant que pour le christianisme, c’est de suivre le Christ (p. 31). Au final, cet ouvrage, à l’écoute des récentes recherches, est particulièrement opportun pour une fructueuse connaissance du Coran, de son histoire et de son actualité, et pour le dialogue interreligieux (p. 68).


Père Pierre Fournier
diocèse de Gap et d'Embrun
1948 - 2021

4 comments

  1. Comment Pierre pouvait-il prendre le temps de lire autant ?
    Avec toutes les autres activités qu’il avait.Enfin ce que j’en ai un peu perçu.
    J’ai quelques courriers et pas mal de mails de sa part.
    Moi qui n’étais pas grand chose,il m’a toujours considéré comme un égal.
    Cet homme était vraiment saint,pour moi aucun doute.Peut-etre un jour le sera t’il vraiment.
    Moi je le souhaite en tout cas et je pense qu’il devrait l’être.
    Vraiment quelqu’un d’exceptionnel.
    Quelle joie de l’avoir un peu cotoié.
    Quelle peine de ne l’avoir plus fait encore.
    Regrets éternels.
    Il était vraiment œcuméniste et au delà encore..
    Je ne sais si tous s’en sont bien rendus compte.
    Après la pandémie ce serait vraiment utile à tous je pense,d’organiser une journée pour évoquer sa mémoire.
    Sinon un jour en distanciel.
    On verrait alors la pluralité et l’universalité de cet homme.
    Il répandait le bien auprès de tous.
    Il m’a beaucoup aidé, spécialement pendant cette pandémie et il m’aide encore tous les jours..
    Il est tellement présent pour moi encore..
    Merci à toi et au-revoir.

    1. Monsieur,

      Merci beaucoup de votre message qui nous dit combien comptait le père Fournier pour vous et, de ce fait, que notre travail de publication vous apporte un peu de réconfort.
      J’ai échangé par message électronique avec le père Fournier jusqu’au jeudi qui a précédé son décès : je partage votre avis sur sa capacité à travailler, la journée, le soir, la nuit et quelque soit le sujet puisqu’il était curieux de tout.
      Le diocèse rassemble les papiers, ouvrages, photographies le concernant. Au besoin vous pouvez me joindre à l’adresse archives@diocesedegap.com
      Je reste à votre disposition,
      Luc-André Biarnais
      Archiviste du diocèse de Gap et Embrun

  2. Il est émouvant de continuer à lire des comptes rendus du Père Fournier comme s’il était toujours parmi nous …ou comme si, auprès du Père, ‘il continuait à en rédiger et à nous les envoyer…Homme de foi et de culture, (et en écho au commentaire précèdent) il était à l’écoute des autres, il acceptait de laisser une place à l’autre, de se mettre en retrait pour permettre à ses interlocuteurs de s’exprimer et d’exister . N’est ce pas la forme accomplie de l’amour du prochain ? Pour avoir comme tant d’autres échangé avec lui sur quelques sujets, ne pourrions nous pas, avant d’effacer et de perdre ses mails, les conserver et les mettre en commun ?

    1. Cher Jean-Pierre,

      Merci infiniment de votre commentaire et de votre fidélité à ce blog. Il reste une cinquantaine de recensions provenant du père Pierre Fournier à publier sur des sujets vraiment différents les uns des autres. Nous savons tous combien il a travaillé et ce, jusqu’à ses derniers jours.
      Pour la question de la conservation des échanges que vous avez eu avec lui, je vous propose également de prendre contact avec moi au numéro de téléphone que vous connaissez ou bien par messagerie électronique (archives@diocesedegap.com ). Ce sera un plaisir de vous revoir.
      Bien à vous,
      Luc-André Biarnais
      Archiviste du diocèse de Gap et Embrun

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