Jésus, au cœur du dialogue interreligieux

Douze musulmans parlent de Jésus, sous la dir. de Fawzia Zouari, Paris : Desclée de Brouwer, 2016, 161 p., 14,90 €.

Bien sûr, pour un musulman, Jésus est d’abord Issa ibn Maryam tel qu’il apparaît dans le Coran, un prophète, le sceau de la sainteté selon Ibn Arabi. C’est aussi le Christ des chrétiens. Cette figure interpelle les musulmans quand les chrétiens disent qu’il est Fils de Dieu, plus encore quand ils disent qu’il est un membre de la Trinité.

Douze personnalités musulmanes, issues du monde des lettres et des arts, pratiquantes ou non, livrent dans cet ouvrage leur lien avec Jésus. Il est pour eux un lieu de rencontre avec les communautés chrétiennes, et ces douze musulmans nous font part de leur découverte de notre foi et de leur désir de dialogue avec les chrétiens.

La question de la crucifixion de Jésus fait figure de pierre d’achoppement : comme le dit Salah Stétié (p. 49) : « Jésus, selon le Coran, ne sera pas supplicié et c’est l’on ne sait quelle figure incorporelle, sosie et semblance, qui subira l’illusion de l’épreuve ». Au contraire, Hassouna Mosbahi dit (p. 121) : « Et Jésus, représenté par les chrétiens de l’Irak, de la Syrie, du Liban, de la Palestine et de l’Égypte, est crucifié encore une fois. Alors même que ces chrétiens sont des Arabes, qu’ils sont attachés à leur terre, à leur culture et à leurs traditions millénaires, datant d’avant l’Islam. Leur légitimité historique n’a pas besoin d’être prouvée ». Il rejoint ainsi le cardinal Bechara Rai qui affirmait dans Le Figaro le 4 avril 2015 « Nous sommes « originaires », pas « minoritaires » ».

Au-delà des malentendus entre l’islam et la culture occidentale, et des menaces brandies par les djihadistes qui accréditent l’idée que les musulmans sont des ennemis héréditaires des chrétiens, ces douze textes insistent sur l’universalité de la figure de Jésus, sur l’héritage commun des deux cultures, et montrent une ambition partagée de refonder la force du lien entre les deux communautés. Même si cet ouvrage aurait gagné à être préfacé, il s’agit d’un livre d’un grand intérêt.

Hélène Biarnais
bibliothécaire du diocèse de Gap et d'Embrun

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