À Gap, Michel Habib et Anne Gombert ont donné le 1er avril 2016 une conférence intitulée L’apport des neurosciences dans les apprentissages scolaires, qui a contextualisé la scolarisation en milieu ordinaire des enfants « à besoins éducatifs particuliers » et mis en valeur la complémentarité des neurosciences et des pratiques pédagogiques. Bien que centrée sur la dyslexie, cette intervention abordait aussi la précocité. Cette conférence pourra bientôt être revue sur le site de Gap sciences animation 05.
Une des spécificités de l’enseignement catholique est de veiller à l’accueil personnalisé de chaque enfant à l’école. Tous peuvent trouver leur place et bénéficier d’un enseignement adapté à leurs points forts et à leurs points faibles. Deux ouvrages, parus en février et en mars 2016, peuvent aider à comprendre les particularités des élèves dyslexiques et précoces, et donner des pistes concrètes pour les accompagner au mieux dans leur scolarité.
Mieux comprendre la dyslexie
Dr Evelyne Pannetier, Mieux comprendre la dyslexie et autres troubles de l’apprentissage, un guide pour les parents et les intervenants, Escalquens : Dangles éd., mars 2016, 179 p., 18 €.
Un long préambule décortique le fonctionnement de la lecture et la manière dont le cerveau s’y prépare, en insistant sur l’importance du développement du langage et de la conscience phonologique. L’auteur définit ainsi la dyslexie, qui est « un trouble permanent qui affecte l’apprentissage de la lecture puis son automatisation […] Son caractère permanent est un élément important qui permet de la différencier des difficultés de lecture : certains enfants ont besoin de plus de temps pour apprendre à lire ou qu’on leur enseigne de façon plus approfondie les diverses stratégies de décodage. Ces retards de lecture sont transitoires et d’origines multiples […] ils disparaissent avec une aide appropriée, contrairement à la dyslexie » (p. 85). Les causes physiologiques sont ensuite présentées.
Un diagnostic de dyslexie ne peut être posé avant le CE 2, puisqu’il faut que l’enfant ait un retard de 18 mois à 2 ans dans l’apprentissage de la lecture par rapport aux autres enfants. L’auteur propose une liste des signes qui peuvent alerter en maternelle, puis décrit les difficultés rencontrées au primaire et dans le secondaire, dont certaines persistent à l’âge adulte.
Le rôle de la famille est crucial dans le soutien à l’élève. Il n’est pas nécessaire d’être spécialiste de la dyslexie ou neurologue pour aider son enfant : dépister la dyslexie par une évaluation professionnelle, dédramatiser le temps des devoirs en mettant en valeur ses points forts, l’aider à gérer son temps, ne pas centrer toutes les activités scolaires sur la lecture.
Pour l’école, l’objectif doit être « la mise en place d’un cadre d’apprentissage permettant à l’élève de surmonter les impacts négatifs de sa dyslexie et de pouvoir ainsi exprimer son plein potentiel intellectuel » (p. 151).
Scolariser les enfants précoces
Roselyne Guilloux est psychologue de l’Education nationale. Elle est l’auteur d’Une approche en 3D de l’élève, paru à Montréal aux éditions Chenelière éducation en 2013, d’Élèves zappeurs, enseignement zappé, paru à Lyon aux Chroniques sociales en 2011, et de L’effet domino « dys », aussi aux éditions Chenelière en 2009. La présentation sous forme de dominos montrant l’imbrication des différents aspects de la dyslexie et de leurs effets sur l’enfant est reprise ici pour la précocité. Cela permet de se repérer aisément dans le propos de l’auteur.
La préface du Dr Olivier Revol, neuropsychiatre, pédopsychiatre, chef du Centre des troubles des apprentissages à l’hôpital neurologique de Lyon, étudiant l’hyperactivité et la précocité intellectuelle, est un gage de sérieux. De plus, les références bibliographiques sont nombreuses. Elles concernent les spécialistes français de la précocité, Jean-Charles Terrassier et Jeanne Siaud Fanchin, à l’exception notable d’Arielle Adda, mais proposent aussi des titres parus au Québec, qui enrichissent la réflexion et donnent des pistes nouvelles.
L’auteur définit le haut potentiel intellectuel et donne des indices pour le repérer, y compris dans le cas d’élèves en difficulté, à l’aide d’un questionnaire inspiré de l’inventaire de Jean-Charles Terrassier. Si ce questionnaire se veut plus nuancé que celui de Terrassier, il est moins simple d’utilisation, moins adapté aux plus jeunes enfants, et l’échelle d’évaluation n’est pas fournie. Toutefois, il est décliné dans une version pour les enseignants, en fonction du niveau scolaire auquel appartient l’enfant, ce qui donne un éclairage nouveau à cet inventaire.
C’est une des particularités de cet ouvrage : là où l’essentiel des livres traitant de ce sujet sont destinés aux parents, celui-ci s’adresse en priorité aux enseignants, souvent mal formés à la détection de la précocité. Trois profils, établis en fonction de l’intégration scolaire des élèves à haut potentiel décrivent bien les difficultés auxquelles ces enfants peuvent être confrontés. L’auteur donne des pistes concrètes pour adapter l’enseignement dans une classe hétérogène et insiste sur le rôle crucial des professeurs : « Les enseignants ont souvent tendance à croire qu’ils ne peuvent rien apporter à ces enfants, alors qu’au contraire, leur rôle est capital » (p.48). Roselyne Guilloux propose l’utilisation d’un « contrat de temps gagné », à valider par l’enseignant, l’élève et les parents, qui met en place un approfondissement des apprentissages. Cela amène en douceur à l’écrit, qui pose parfois problème aux élèves « surdoués ». Elle propose aussi des évaluations adaptées, qui limitent la simple restitution de connaissances pour privilégier les exercices mettant en oeuvre les notions de manière plus complexe. Ils ont le mérite de mieux convenir à la pensée particulière de l’enfant précoce et de mieux soutenir son attention, les connaissances étant tout de même évaluées par de tels exercices.