Juste Lipse, Crucifixions en trois livres pour servir l’histoire sainte et profane, traduit, présenté et annoté par François Rosso, Paris : Arléa, 254 p., [20 €].
La réédition, plus de quatre siècles après sa première publication, d’un ouvrage sur la croix pourrait sembler être une concession à une érudition un peu vaine. Pourtant, la croix est bien au cœur du mystère chrétien puisque c’est cloué sur l’une d’elle qu’est mort Jésus Christ avant sa résurrection. D’autres apôtres, comme André (p 54-55), donnèrent leurs vies sur ce qui est resté comme le symbole de la mort des esclaves : « Au vrai, la croix était tellement associée à l’état d’esclave qu’il suffisait de parler de supplice servile pour que tout le monde comprit » (p 78). Né humblement dans une étable, Jésus donne sa vie pour le salut du monde par la croix.
Faut-il souligner que des confessions se réclamant du christianisme nient la crucifixion au mépris de la théologie et des sources historiques ? (p 70) « On est porté à conclure qu’elle était bien à quatre branches et à l’imaginer ainsi » écrit Joost Lips page 70 !
Joost Lips s’interroge, comme nous, sur la douleur et sur, au fond, comment elle est possible. Il est lui-même, une personnalité tiraillée par l’expression de la foi. Il est né catholique, il le redevient en 1591 après avoir appartenu au calvinisme durant quelques années et avant la publication du présent livre sous le titre De Cruces (1593). Il est natif de Flandres, territoire irrédentiste face à la domination des Habsbourg d’Espagne.
Ce livre a au moins deux niveaux de lecture, également exigeants. Le premier est celui d’un livre publié par un historien, penseur de son temps, décortiquant un sujet d’étude, ici la crucifixion. Le deuxième est évidemment de l’ordre de la foi. Que représente la crucifixion de Jésus ? Quel est son sens ? Quelle est la raison de la douleur et du mal ?
Luc-André Biarnais archiviste du diocèse de Gap et d'Embrun