De nouvelles méthodes de consultation des archives

Nouvelles pratiques de la recherche, nouvelles méthodes de travail en archives

Les statistiques et l’observation des lecteurs en salle de lecture ou même la consultation des archives mises en ligne conduisent aujourd’hui à des formes différentes de mise à disposition des documents au public et à une évaluation nouvelle des pratiques pour une plus grande efficacité.

Notre propos peut être illustré par deux exemples, tous les deux puisés parmi les lecteurs des archives du diocèse de Gap et d’Embrun. Les prénoms de ces personnes ont été changés.

Bruno est étudiant dans une université d’Amérique du Nord. Son sujet de mémoire est lié aux Hautes-Alpes dont sa famille est originaire. Quand il se rend en France, il n’a que quelques jours à disposition pour les différents centres d’archives où se trouvent ses sources. Il a préalablement utilisé la messagerie électronique (la correspondance postale a totalement disparu pour les chercheurs) pour préparer sa venue, commander les articles à consulter, envisager une éventuelle demande de dérogation pour des documents non communicables. En salle de lecture, il s’est muni d’un appareil photo, d’un ordinateur et le seul crayon qu’il utilisera, il l’a emprunté à la présidence de salle… ce qui est significatif. En réalité, il ne prendra pas de note sur les documents consultés et se contentera de les photographier afin de les exploiter chez lui. Il fait de même avec les Annuaires du diocèse de Gap et quelques livres d’histoire locale. Il avait réservé une place durant trois jours et la quittera au terme de deux.

Jacques, lui, a eu une activité salariée pour le diocèse dans les années précédentes et ses compétences sont toujours utilisées tant à l’échelle diocésaine qu’à celle de sa paroisse. A ces deux niveaux il travaille sur des projets de rénovation et d’extension de bâtiments et sur l’histoire. Ses activités asociatives et familiales ne lui laissent guère de temps pour consulter les archives aux heures ouvrables. Armé de son appareil photo, il prend des clichés des documents qu’il juge les plus intéressants pour sa recherche : sa séance de travail aura duré deux heures.

Il ne s’agit pas de conclure, comme un directeur d’archives départementales l’a fait, que la salle de lecture est désormais « un désert des Tartares ». Il faut aller au-delà du constat et adapter nos pratiques aux demandes nouvelles des chercheurs. Juger, positivement ou négativement, ces méthodes de travail est vain : leur utilisation générale montre qu’il faut désormais accompagner les lecteurs pour qu’ils puissent exploiter au mieux leurs passages dans nos services. Cela ne va pas sans effort, certes : si les lecteurs passent moins de temps en salle de lecture tout en exploitant autant de documents, cela signifie que le nombre limite de boîtes et registres mis à disposition par séance de travail doit aussi être adapté et, le plus souvent, augmenté.

Une salle de lecture avec un ordinateur relié à Internet et réellement accessible, un code wifi à disposition des lecteurs sont un minimum aujourd’hui. Bien entendu, il convient d’installer les salles de lecture dans des lieux correctement éclairés pour prendre de bonnes photographies. Lorsque des fonds sont mis en ligne il faut veiller à ce que ceux-ci soient correctement identifiés pour être parfaitement référencés dans des publications. De même les autorisations de photographier doivent être explicites sur le droit et particulièrement sur celui d’exploiter et communiquer les documents. L’open source et le partage des connaissances doivent s’accompagner d’une traçabilité des données ne serait-ce que pour montrer l’utilité d’un lieu de conservation des originaux.

De nouvelles données évaluées

Nos pratiques d’évaluation doivent elles aussi évoluer. Les objectifs doivent moins tenir compte du nombre de séances de travail. En revanche, le nombre de lecteurs, de documents exploités, de visites sur le blog du service, s’il existe, et de documents numérisés consultés par les internautes sont désormais des données essentielles à inscrire dans le rapport annuel d’activité et lors d’entretiens avec la hiérarchie.

L’enjeu est donc double pour les archivistes et, dans une mesure semblable, pour les bibliothécaires. Il s’agit bien sûr de montrer aux hiérarchies et aux collègues de nos structures la capacité d’adaptation des services aux réalités du monde de la recherche, interne et externe. À destination de celui-ci, nous montrons notre capacité à « contribuer à l’enrichissement du patrimoine culturel et au progrès de la recherche historique » comme le demande le Directoire pour la gestion des archives diocésaines, dans le préambule au titre V : Communication et mise en valeur.

Luc-André Biarnais
archiviste du diocèse de Gap et d'Embrun

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