Célestin Freinet au grand séminaire

Jean-Pierre Jaubert, Célestin Freinet, Résistant-Pédagogue, 1944-1945, Gap : Éditions des Hautes-Alpes, 233 p., 22 €.

Jean-Pierre Jaubert retrace ici le parcours dans les Hautes-Alpes de Célestin Freinet (1896-1966), pédagogue et membre du parti communiste de 1928 à 1953.

Né dans les Alpes-Maritimes, Célestin Freinet épouse Élise Lagier-Bruno, native de Pelvoux, en 1926 à Saint-Martin de Queyrières. Arrêté dès mars 1940 pour ses activités politiques, avant même l’arrivée de Philippe Pétain à la tête du pays, il est placé en résidence surveillée à Vallouise. Il entre en Résistance active en juin 1944 puis participe au Comité départemental de Libération. Celui qui définit « la renaissance de la France par la renaissance de l’école » (p 224) ouvre dans les locaux du grand séminaire diocésain (le campus des trois fontaines en 2019) un centre scolaire entre janvier et août 1945. Il accueille 53 garçons et 32 filles avec le soutien de Lucie Aubrac.

C’est à partir de la page 191 que ce passage au grand séminaire est présenté. Jean-Pierre Jaubert croise des informations venues des Archives diocésaines (fonds Mgr Auguste Bonnabel, 1932-1961), de la série W des Archives départementales, et de la bibliographie.

L’auteur reprend pages 199 à 205 la description analytique de l’abbé Joseph Richard dit Duchamblo des activités scolaires du centre et, notamment celle du « journal mural qui portait comme en-tête une faucille et un marteau ». Il rapproche la méthode Freinet « des conceptions suisses et de l’école montessorienne » montrant les connaissances locales des innovations pédagogiques par des enseignants haut-alpins d’une part et, d’autre part, la confrontation entre celles destinées à l’école laïque et celles pour l’enseignement confessionnel.

La critique de l’abbé Joseph Richard se fait plus acerbe encore quand il décrit le départ des enfants du centre scolaire « en ajoutant encore aux dégats [sic] causés par l’occupation italo-allemande » (p 205). Cette comparaison entre les réquisitions militaires, y compris de l’armée française au début du conflit, avant celle de l’école était déjà présente dans la lettre que Mgr Auguste Bonnabel, propriétaire des lieux comme évêque de Gap, adresse au préfet le 28 novembre 1944 avant l’ouverture du centre par Célestin Freinet (p 192-193).

Cet ouvrage de Jean-Pierre Jaubert met en lumière le rôle local d’un personnage emblématique des questions pédagogiques du XXe siècle dans notre pays. La personnalité de l’auteur, lui-même acteur politique et ayant eu des responsabilités nationales dans les mouvements pédagogiques, et sa capacité didactique comme l’ont montré ses précédents ouvrages, l’indiquaient totalement pour rédiger celui-ci.

Luc-André Biarnais
archiviste du diocèse de Gap et d'Embrun

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