Un livre posthume de Jean d’Ormesson

Jean d’Ormesson, Un hosanna sans fin, Paris : Éditions Héloïse d’Ormesson, 2018, 141 p., 14 €.

À la mort du célèbre écrivain académicien, à 92 ans, ce livre de Jean d’Ormesson Hosanna sans fin était prêt à la publication pour former une trilogie avec Comme un chant d’espérance et Guide des égarés. En soixante brèves méditations, il s’agit d’un livre-testament donnant une synthèse des interrogations de l’académicien sur la destinée humaine. L’auteur tient à faire réagir son lecteur : « Grâce à Dieu, je vais mourir, comme vous » (p. 13). La vie humaine s’accroche à « deux seules choses sûres : nous sommes nés ; nous mourrons » (p. 13). Agrégé de philosophie, Jean d’Ormesson s’engage alors dans les questions existentielles majeures : qu’est-ce qui peut justifier notre naissance, et notre mort qui génère l’angoisse ? De là, l’auteur va parcourir l’histoire du monde depuis des milliards d’années, depuis le big bang initial (p. 59) jusqu’à l’apparition de la vie, du premier sourire humain, du premier émoi amoureux. Ce saisissant raccourci sur l’évolution du cosmos, du monde, et de la vie, fait penser aux recherches de Teilhard dans Le phénomène humain. L’académicien salue avec ferveur l’avènement de la science pour la mutation novatrice qu’elle suscite dans la vision de l’univers et de l’être humain. Stimulé par cet éblouissement scientifique, le penseur grandit en curiosité sur les questions fondamentales de l’aventure humaine vers les avenirs possibles. Pour lui, le croire va plus loin que le savoir. Le penseur mentionne là l’apport remarquable des grands mythes (Gilgamesh) et des diverses religions ouvrant sur un au-delà de l’histoire présente : « Les religions partagent une même conviction : meilleure et plus belle, il y aura une autre réalité que celle où nous vivons » (p. 38). D’un ton confidentiel, parcourant les religions, notamment les monothéismes, Jean d’Ormesson confie : « La foi est plus puissante que la pensée, elle soulève les montagnes » (p. 111). Il se déclare non pas athée, mais agnostique (p. 117) et il conclut aussi par une nette parole d’attachement au Christ : « Lui au moins, il est permis de l’admirer et de l’aimer… Si quelqu’un a laissé une trace éclatante dans l’esprit des hommes, c’est bien le Christ Jésus » (p. 141).

Ce livre posthume, ou cet ensemble de « feuillets » (p. 115), constitue ainsi une rapide et saisissante exploration de la condition humaine, s’interrogeant, de façon sans cesse rebondissante, sur les énigmes de la vie, sur l’être humain dans l’univers, sur la destinée personnelle, sur la science et la foi, sur l’avenir de l’humanité, sur le rôle des croyances et des religions. Le titre de ces méditations Hosanna ! est emprunté à l’imploration de la liturgie juive (« De grâce, sauve-nous ! ») devenue une exclamation chrétienne joyeuse : « Vive Dieu qui nous sauve ! ». C’est dire l’insatiable émerveillement, « sans fin », de Jean d’Ormesson, au cœur de ses questionnements et de son aspiration à trouver une espérance, « un coin de ciel bleu » (p.139).


Père Pierre Fournier
diocèse de Gap et d'Embrun
1948 - 2021

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